De Rossellini à Pasolini, Cinéma et religion catholique.

Publié le par DANANCIER Yves

"Film totalement à part dans l'oeuvre de Rossellini où les miracles tombent souvent de manière fulgurante sur les individus. Le film représente un versant du sacré plus apaisé et sans drame

Les actes de la vie de saint François, comme dans Païsa, seront des petits bouts juxtaposés côte à côte sans aucuns liens. C'est une émotion majeure de Rossellini dans le cinéma que d'arrêter de raconter une histoire linéaire.

Rossellini choisit assez peu dans les textes des Fioretti ceux racontant la vie de saint François. Il choisit pas mal de textes à côté racontant la vie de Ginapro. C'est un simple, inventif, un peu fou, un fantaisiste qui n'a pas de responsabilité. Du coup, Rossellini décentre le film car il n'a pas envie de faire un film pieux qui exalterait la vie de saint François mais plutôt un film sur la fantaisie et l'innocence. Au final, le film évoque davantage Ginapro que saint François.

Dans la vie de saint françois, Rossellini choisit le moment de la pureté. Le moment où les frères ne sont encore que douze et pas des milliers. Il sont reconnus par le pape mais pas encore pris dans les affaires du monde. cette vie dans la cabane c'est le moment de leur innocence maximum.

Rossellini ne veut pas parler de politique. Il a tourné un douzième épisode qu'il n'a pas mis dans le film et qui était plus politique. Saint François sur un marché se portait au secours d'une prostituée qui était agressée. Il faisait scandale et comparaissait devant deux évêques dans la cathédrale. Cet aspect politique vis à vis de l'église instituée, il l'abandonne pour exalter l'émergence d'une façon très pure de vivre la chrétienté.

Les moines sont filmés comme sortant d'un bas-relief : gris dans la boue grise. Ce sont comme des moines qui font parti du limon de la terre. Collé au fond du mur, de temps en temps, ils s'avancent comme si un peu de spiritualité se détachait. Rossellini veut épurer l'image, le plus simple possible. Il veut revenir à une représentation esthétique primitive de Giotto aussi beau aussi pur aussi simple que du Giotto. Rosselinni tasse les moines dans le plan, serrés les uns contre les autres comme dans les fresques de Giotto les moines sont serrés comme dans une boite de conserve ou un aquarium. C'est pour ça que les espaces sont tout petits. A l'inverse, quand ils sortent, ils courent et dansent comme dans une comédie musicale. Des hommes entre eux compacte et qui s'expriment par la danse, le mouvement, les gestes. Cela devient un film burlesque. Ce qui importe c'est le concept et les détails, rien au milieu

Au début tous les moines se ressemblent. On ne sait pas qui est saint François il faut attendre cette phrase bizarre "Pourquoi toi, pourquoi tout le monde te suit ?". la séquence avec le lépreux est tournée en nuit américaine. Il ne s'est rien passé : le lépreux reste un lépreux. François n'est pas le christ. C'est comme si les étoiles éteint tombées sur la terre." CineClubCaen (extrait)

Onze_Fioretti_de_Francois.jpg

Il existe de nombreux films pour témoigner de la culture chrétienne, le récent succès populaire "Des hommes et des Dieux" laisse à penser que la production artistique sait, elle, se dispenser de provocations pour exister.

Que l'on me permette ici de conseiller aux mécréants dont je suis, de Françoise Dolto, la lecture de deux ouvrages de commentaires consacrés aux Evangiles. 

"L'adaptation de Pasolini est très fidèle au texte de saint Matthieu. Mais Hervé Joubert-Laurencin dans l'excellent Portrait du poète en cinéaste est excessif lorsqu'il déclare qu'elle suit intégralement le texte de l'évangéliste en respectant chaque mot de l'édition de la Pro Civitate Chritiana d'Assise.

Pasolini décrit un nombre restreint de miracles : la guérison des possédés, celles du lépreux et de l'infirme, la multiplication des pains, la marche sur du Christ sur l'eau, la découverte prédit de l'ânesse à Jérusalem et le figuier desséché. Il exclut, parmi les nombreuses guérisons de possédés et d'invalides évoqués par le texte de l'évangéliste, deux des plus spectaculaires : la guérison du fils du centurion et celle des deux aveugles (Mat. IX, 27-31). ...

"Si Pasolini préfère traiter sobrement ces miracles c'est qu'il y croit peu. Pour lui la parole est le vecteur principal de la force de conviction du Christ. Il se montre tout aussi sobre dans le traitement des apparitions. L'ange qui apparaît trois fois à Joseph (pour qu'il épouse Marie, pour la fuite en Egypte, et pour le retour en Judée permis par la mort d'Hérode) pourrait surgir de ses pensées car, à chaque fois, il surgit au réveil de Joseph. Les visualisations des tentations dans le désert sont extrêmement furtives : un homme au visage buriné apparaît de nulle part (qui lui demande de transformer les pierres en pain, qui le conduit devant un précipice et lui fait contempler un paysage à l'horizon dégagé) ...

" .. Pasolini choisit le plus moraliste des apôtres, Matthieu, le tenant de la parole et de la globalité du message. Il opose le sacré dans son expressionnisme lyrique au néoréalisme des paysans. La parole, omniprésente, est ce qui relie le sacré au peuple.

Jésus, bloc de paroles, possède une psychologie impénétrable. ...

A l'égal de la parole, la lumière et la musique servent au passage de sacré vers le profane Toutes les musiques du monde sont conviées : Prokofiev et Mozart, du negro spiritual, des chants congolais. Et par dessus tout, La Passion chavirante de Bach." CineClubCaen (extrait)

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Publié dans Films "Société"

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